OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Gaypride: la polémique poids plume http://owni.fr/2011/04/12/gaypride-affiche-polemique-coq-lgbt/ http://owni.fr/2011/04/12/gaypride-affiche-polemique-coq-lgbt/#comments Tue, 12 Apr 2011 17:50:26 +0000 Hélène David http://owni.fr/?p=56566

Pour l’Égalité, en 2011 je marche, en 2012 je vote.

C’est le slogan de la Gaypride de cette année. L’invitation à l’engagement politique est pleine de noblesse, mais sa mise en image fait largement débat. Cette année, l’inter LGBT a fait appel à une agence de communication pour réaliser (gratuitement) l’affiche de l’événement. Le choix de l’illustration s’est porté sur un coq blanc portant un boa rouge, le tout sur un fond que certains voient bleu. Des codes symboliques et des couleurs qui renvoient à la République et la nation.

Le but de cette affiche est notamment d’interpeller le public au-delà des réseaux habituels“, explique Nicolas Gougain, président de l’inter-LGBT, qui concède qu’il a lui-même été surpris quand il l’a découverte.

Un jury d’associations de l’inter-LGBT s’est réuni pour valider l’affiche. Nous avons été surpris, mais on a aussi pris du recul, en se disant qu’on était pas obligés de proposer une affiche consensuelle, avec un rainbow flag, et qu’un peu de second degré ne ferait de mal à personne!

Sur twitter, les désaccords s’expriment :

En plein “débat” sur “l’identité nationale”, l’affiche infecte de l’Inter-LGBT

La réflexion initialement partagée par Marc Endeweld, journaliste, a beaucoup circulé. Certains demandent si la gaypride sera “un défilé de dindes“. “Il fait de l’œil à qui le coq borgne de l’affiche?” s’interrogent d’autres.

“Cette République n’est pas la mienne”

Un groupe facebook intitulé “l’affiche officielle de la Marche des Fiertés parisienne 2011 est infecte” a également vu le jour. Cécile Lhuillier, qui se réjouit du succès du groupe qu’elle a créé explique que sa démarche a été personnelle et spontanée, en réaction à une affiche qu’elle juge “lamentable et souverainiste“:

Quand j’ai découvert l’affiche, j’ai tout simplement eu envie de vomir. Ce ne sont pas des signes dans lesquels je me reconnais. Je ne comprends pas du tout la démarche de l’inter-LGBT. On parle de réappropriation des codes de la république, avec un coq et le bleu, blanc, rouge, d’un message qui dirait “on est tous citoyens”… Moi je ne suis pas particulièrement fière d’être française, surtout pas en ce moment. Et de quelle république parle-t-on? De celle qui ne veut pas reconnaître nos droits, qui ne veut pas qu’on ait de famille? Cette république, ce n’est pas la mienne!

Dider Lestrade est un membre fondateur d’Act Up. Il estime que “tout le débat qui a lieu sur facebook a tout à fait lieu d’être“, jugeant que cette affiche constitue “une bourde esthétique et symbolique“:

Je ne suis pas un adepte du politiquement correct. Mais là franchement on pourrait trouver autre chose! Il y a quelque chose de grossier dans cette affiche. Elle appelle à des associations d’idées…

Le coq, propriété du FN?

Pour Gilles Bon-Maury, président de l’association Homosexualités et Socialisme (HES), la polémique est “surprenante et dangereuse“. S’il concède que “l’usage fait par le FN de ces symboles est nauséabond“, il estime qu’ils ne sont et ne doivent pas être la propriété du parti d’extrême droite.

Nous avancerons contre le FN justement en nous appropriant les symboles de la nation. La référence au coq est un jeu sur la virilité dans la basse-cour, je suis très embêté que des militants y voient une référence au nationalisme. Je trouve ça bien d’interpeller les citoyens.

Ce qui est certain, c’est que l’affiche aura eu le mérite de faire parler d’elle et de la marche des fiertés. C’est donc mission accomplie pour l’inter-LGBT. “En ce sens, le buzz est plutôt positif” lâche Nicolas Gougain, alors que l’affiche n’est même pas encore imprimée.

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La crise belge par les data http://owni.fr/2010/09/09/la-crise-belge-par-les-data/ http://owni.fr/2010/09/09/la-crise-belge-par-les-data/#comments Thu, 09 Sep 2010 18:05:35 +0000 Nicolas Kayser-Bril http://owni.fr/?p=27127 « Préparons-nous à la fin de la Belgique ! » C’est en substance ce qu’on déclaré les leaders francophones ces derniers jours, un refrain que les Flamands entonnent depuis déjà quelques décennies. Faut-il couper la Belgique parce que ces entités constituent des nations différentes, ou bien faut-il se préparer à construire de toutes pièces de nouvelles identités pour remplacer la belge ?

Laissons parler les données. Nous avons mis en place une application permettant de comparer les chiffres relatifs aux trois régions belges (Flandre, Wallonie et Bruxelles-capitale) sur certains thèmes.

Sur certains aspects, on constate de fortes disparités. L’impôt fédéral payé par habitant, par exemple, est 25% supérieur en Flandres par rapport à la Wallonie. Résultat, la solidarité nationale peut apparaître à sens unique, les Flamands payant 1,2 milliards d’euros transférés sous forme de ‘rééquilibrage’ aux francophones.

Et pourquoi les Wallons payent-ils moins d’impôts ? Parce qu’ils travaillent moins! Le taux d’activité (ceux au travail + ceux cherchant un emploi) est de près de 10 points supérieur en Flandre. On comprend mieux ainsi ce sur quoi repose le ressentiment des Flamands.

Pas la peine de stigmatiser les Flamands en les traitant de « populistes égoïstes » pour autant, comme on peut le lire dans les colonnes du Monde. Leurs revendications font échos à des problèmes réels, pour lesquels ils considèrent que les solutions proposées ne suffisent pas. On ne peut pas en dire autant de la frénésie anti-gitans qui sévit en France, où des politiques, soutenus par une bonne partie de la population, s’en prennent à un groupe pour des motifs totalement farfelus et dénués de réalité statistique (« ils ont des trop grosses voitures ! »)

Les Belges ne se marient pas non plus entre eux. Moins de 0,5% des mariages belges concernent des relations entre résidents flamands et wallons. (Cette statistique a été compilée en fonction des lieux de résidence, pas de naissance, si bien qu’un Flamand vivant en Wallonie puis s’y mariant à une Wallonne n’est pas comptabilisé). Cela reste environ 6 fois moins que le nombre de mariages conclus entre un Belge et un étranger ! Pour donner un élément de comparaison, cela correspond plutôt au taux de mariages entre Français et Britanniques (source INSEE).

In Potjevleesch we trust

Malgré ces écarts flagrants, les Belges restent soudés autour de valeurs… belges. Loin d’être anodins, les habitudes de consommation sont étrangement similaires. Si vous regardez l’onglet “consommation” de l’appli, vous verrez que les différences entre Flandre et Wallonie ne divergent jamais de plus de 10%.

Si l’on s’intéresse à la charcuterie, par exemple, on constate que l’on dépense sans compter des deux côtés de la frontière linguistique : 475€ en Flandre et 468€ en Wallonie par an et par ménage. Bruxelles, avec tous ses étrangers eurocrates qui ne comprennent rien au filet américain, au filet d’Anvers ou aux pâtés queue de charrue, ne dépense qu’un maigre 300€, tout comme les Français (357€ selon l’INSEE [XLS]).

Et Bruxelles ?

En plus d’être la plus importante des capitales de l’Union Européenne, Bruxelles est à la fois la capitale de la région flamande et la principale ville francophone. Véritable nœud gordien des relations entre communautés linguistiques, la ville semble être au cœur des revendications des uns et des supplications des autres.

L’application permet de choisir où vous souhaitez voir Bruxelles : indépendante, wallonne ou flamande. On constate qu’en dehors du tourisme, où Bruxelles et la Flandre concentrent la majeure partie des nuitées, et du nombre d’étrangers, faire varier l’appartenance de la ville vers l’une ou l’autre région n’influence que peu les équilibres.

On pourrait penser que cet état de fait tient à la relative pauvreté de la ville. Son centre, loin d’exulter de richesses comme à Trafalgar Square ou à la Concorde, fait plutôt penser à une ville post-socialiste ayant raté sa reconversion. Comparée à Anvers, principale ville de Flandre, Bruxelles n’attire pas l’oeil. Plus pauvre relativement au nombre d’habitants, c’est à se demander pourquoi son statut importe tant aux deux camps.

La raison tient au découpage anachronique des frontières administratives. Tout comme il est inconcevable de limiter Paris à ce qu’on trouve à l’intérieur du périphérique, la région Bruxelles-Capitale souffre d’atrophie sur ses 160 km² (à peine 50% de plus que Paris intra-muros). Prise dans son ensemble, la métropole bruxelloise retrouve l’étoffe d’une ville d’importance mondiale, produisant le quart de la richesse belge.

Le problème de la ville tient à son corset flamand : l’arrondissement Bruxelles-Hal-Vilvorde (BHV), situé en Flandre, accueille l’expansion territoriale de la capitale et concentre en particulier ses plus gros contribuables qui, à la manière d’une ville américaine, délaissent le centre. Bruxelles se trouve ainsi à cheval entre la Flandre et la région Bruxelles-Capitale, ce qui ne facilite pas la division du pays et explique pourquoi la scission de BHV monopolise depuis plus de 3 ans la vie politique du pays.

Notre dossier, qui accompagne cette application, est constitué de trois articles de blogueurs belges qui nous plongent dans l’actualité de leur pays. Qui n’en est plus un ?

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Partager un devenir commun : l’ère des réseaux-nations http://owni.fr/2009/11/17/partager-un-devenir-commun-lere-des-reseaux-nations/ http://owni.fr/2009/11/17/partager-un-devenir-commun-lere-des-reseaux-nations/#comments Tue, 17 Nov 2009 10:26:45 +0000 Arnault Coulet http://owni.fr/?p=5520

[Cross-posted sur Netpolitique]

Alors qu’en France le débat sur l’identité nationale fait rage, les créateurs du web d’outre-atlantique considèrent vraisemblablement cette question outrepassée. C’est vrai qu’à l’heure du Réseau, l’idée de Nation a quelque chose de quasi-comique, ou quasi-tragique, pour des services en ligne qui agrègent des communautés se liant selon leurs affinités plutôt que selon les critères constitutifs classiques de la Nation. Mais il n’est pas question pour ces services web de faire Tabula rasa de ces critères, profondément ancrés dans l’univers collectif : certains services, comme Facebook, loin de l’idée primaire de détruire l’idée de Nation, se servent de celle-ci comme d’un terreau pour réinventer le lien social et surtout le sentiment d’appartenance aux réseaux.

Est-ce à dire qu’un Facebook invente l’idée d’une néo-Nation ? Les réseaux sociaux sont-ils des Réseaux-nations (Networks-Nations) ? Si dans 10 ans, le sujet “Facebook est il un réseau-nation ?” siège en invité d’honneur du Grand oral de Sciences-Po, il faudra d’abord, pour l’étudiant discipliné, revisiter les définitions classiques de la Nation. Soyons bon élève et anticipons l’épreuve.

1. La Nation, définition politico-juridique

Dans la version la plus commune du Petit Robert, il est dit qu’une nation est « un groupe humain constituant une communauté politique, établie sur un territoire défini (…) et personnifiée par une autorité souveraine ». Pour résumer, il s’agit donc d’un peuple auquel s’ajoute l’idée de gouvernement. De plus, si “le terme de “Nation” n’est pas défini juridiquement, toutefois l’usage en politique internationale en fait un équivalent d’État-souverain, dont les critères constitutifs sont les suivants :
# une population
# un territoire établi
# un gouvernement qui n’est subordonné à aucun autre
# une reconnaissance internationale

Le plus surprenant, c’est qu’un réseau comme Facebook remplit ces critères :

# Il existe bien une population de facebookers, qui vit sur un territoire, certes numérique, mais bien délimité, et gardé par des postes de douane aux frontières (le login)

# L’autorité souveraine s’y exerce t’elle ? Y a t’il, selon l’expression commune, un bras armé de la nation qui détient le monopole de la force ? Sans conteste la réponse est oui : la législation de chaque réseau social est celle imposée par ses créateurs (terms and conditions) ou construite par sa population par l’expérience utilisateur. Le “ou” n’est pas exclusif, Les décisions des développeurs de facebook régissent nos expériences d’utilisateurs, tant avec le site qu’avec le reste de la population. La soumission à l’autorité s’est faite avec violence, elle a d’abord été le fruit d’une longue lutte entre le gouvernant et les gouvernés dans un rapport monarchique. Prenez, par exemple, la litanie de changements de Terms & Conditions sur Facebook , certains ont provoqué des soulèvements violents parmi sa population. La monarchie absolue des débuts de Facebook a donc été contrainte de se constitutionnaliser, et mettre en oeuvre en avril 2009 une approche plus transparente et démocratique pour imposer ses décisions par le vote : Facebook site Governance “Governing the Facebook service in a more transparent way”. Une autorité souveraine s’exerce donc dans Facebook, que ce soit par la force à ses débuts, ou par le vote depuis avril. De plus, l’adéquation de Facebook avec les subtilités de la définition  française, pour qui la nation est, au sens constitutionnel, la notion juridique désignant au nom de quoi est exercé le pouvoir législatif, peut tout à fait être débattue. Selon la perspective politique à la française, en tant que mise en œuvre à titre juridique par la Constitution actuelle de la République française, la Nation est un ensemble de citoyens détenant la puissance politique (d’où l’Assemblée Nationale, et les députés représentants de la Nation). En l’occurrence, le fait d’impliquer sa population dans un processus démocratique, confère aux répondants de la page Facebook site governance le rôle de représentants de la Nation Facebook.

gandhilego

# Quant au critère de “reconnaissance internationale”, il faut savoir que, dans la vraie vie des relations internationales entre États, il est d’emblée un critère de mauvaise foi : en effet, la République Populaire de Chine a bien pu exister sans reconnaissance internationale de grands États du monde. La reconnaissance internationale repose avant tout sur l’état des rapports de force entre États. A ce jeu, mieux vaut montrer les bras, ce qu’a fait fait sans complexe le patron de Facebook quand il a annoncé en septembre 2009 que la “population” de Facebook (300 millions d’âmes) avoisinait celle des États-Unis (307 millions), l’effronté positionnant ainsi implicitement son réseau dans le concert des nations et dévoilant par là même ses désirs de conquête du monde (Ndlr: 1 mois plus tard, début novembre 2009, Facebook aurait dépassé 325 millions d’internautes, avec une croissance démographique de 5 millions de nouveaux utilisateurs par semaine…)

Ces 4 critères sont incroyablement condensés dans cette vidéo de Facebook Site Governance, dans laquelle Mark Zuckerberg (le Président / PDG /Monarque de Facebook) invite pour la première fois la population Facebook à voter. Le trait le plus caractéristique de cette vidéo est sûrement que vous ne la trouverez nulle part ailleurs sur le web: ni sur Youtube, ni sur un blog, nul part… Mark Zuckerberg s’adresse exclusivement à la population Facebook, sur son territoire, en invitant à un nouveau principe de gouvernance tout en renforçant le sentiment d’appartenance au réseau

2. La Nation, définition en Sciences humaines

Le sentiment d’appartenance est justement au cœur de la définition de la Nation par les sciences humaines. Un des sens admis est le suivant : « une communauté humaine identifiée dans des limites géographiques parfois fluctuantes au cours de l’histoire, mais dont le trait commun supposé est la conscience d’une appartenance à un même groupe »

A partir de cette définition, deux écoles s’affrontent (objective vs. subjective), conçues à partir des expériences nationales françaises et allemandes :

# L’école objective est issue de la philosophie allemande du début du XIXe siècle, défendue par Johann Gottlieb Fichte, selon laquelle les membres d’une Nation ont en commun des caractéristiques telles que la langue, la religion, la culture, l’histoire, voire les origines ethniques, tout cela les différenciant des membres des autres nations. Fichte, dans ses Discours à la nation allemande (1807-1808) , insiste sur l’idée de peuple et l’importance de la langue. Il est vrai, l’étymologie de “Nation” est liée à la notion de naissance (nascere). Certaines données objectives permettent de définir une nation : le territoire, l’ethnie, la langue, la religion, la culture, l’État. Mais l’idée de nation ne leur est pas réductible. Il existe ainsi des nations plurilingues (ex : la Suisse) ou connaissant plusieurs religions (ex : l’Allemagne). Il y a également des nations sans territoire propre ou d’autres encore qui sont partagées entre plusieurs États. Cette conception de la Nation trouve donc ses limites, et pourrait bien être appliquée dans ses exceptions et artefacts à un réseau comme Facebook (une nation multilingue avec plusieurs religions)

La conception moderne de la nation dépasse largement le cadre objectif. Elle trouve plutôt sa source dans un ensemble complexe de liens, subjectifs, qui fondent le sentiment d’une appartenance commune. Et c’est aussi dans cette source que s’abreuve les réseaux-nations : en exacerbant le désir et en sollicitant le sentiment d’appartenance à leur réseau

# L’école subjective est issue de la philosophie française du XVIIIe siècle et liée à la Révolution française, conceptualisée par Ernest Renan. Elle insiste sur la volonté de « vivre ensemble », la nation étant alors le résultat d’un acte d’autodéfinition. Ernest Renan, dans sa conférence de 1882 intitulée “Qu’est-ce qu’une nation ?”, pose comme critères de l’appartenance nationale “le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu indivisiblement”. Selon lui, “l’existence d’une nation est un plébiscite de tous les jours.” C’est dans cette direction subjective que Facebook semble vouloir diriger ses internautes. Le “désir de Vivre ensemble” est un sentiment d’appartenance immensément plus fort que ce qu’éprouvent habituellement les membres d’une communauté, terme usuel pour désigner les membres d’un réseau. Une communauté n’est qu’un “ensemble de personnes, d’individus, ayant un, ou des intérêts communs”, définition bien pâle en comparaison de la définition subjective de la Nation. Il faut, pour les réseaux sociaux, trouver un ciment plus liant entre ses membres, ce que les anciens critères constitutifs de la Nation offrent encore.

Alors comment Facebook parvient-il à exacerber le sentiment d’appartenance de sa communauté pour parvenir à la maturité d’un Réseau-Nation ?

Au mois d’octobre, peu après avoir annoncé être devenu le 5ème pays du monde en terme de population, Facebook a facilité le lancement et la communication de deux initiatives qui sondent puis traduisent l’opinion des Facebookers :

# La première, Le Bonheur National Brut (BNB), analyse les dizaines de millions de statuts mis à jour quotidiennement pour en tirer de substantielles conclusions sur le “bonheur” global de la nation : “Chaque jour, des millions de personnes partagent ce qu’elles ressentent avec les gens qui comptent le plus dans leur vies via les modifications de leur statut Facebook. Ces mises à jour sont de petites ouvertures sur l’humeur des personnes. Elles sont brèves, directes et décrivent ce qui se passe dans leur semaine, aujourd’hui ou à l’instant même. Toutes rassemblées, ces mises à jour sont révélatrices de notre humeur collective” Si l’application se limite pour l’instant aux USA pour des raisons de langue, la vision est belle et bien de révéler “l’humeur collective” du réseau tout entier rassemblé en nation globale. Il est d’ailleurs intéressant de remarquer la consonance du BNB avec un baromètre national médiatique tel que le Produit National Brut (PNB). Ou encore la référence inconsciente du BNB à l’indice de confiance des ménages, dont chacun ignore la signification exacte tout en le consacrant comme révélateur quasi-scientifique de notre forme économique nationale, et donc de notre devenir commun

# La deuxième est en fait un nouveau portail (peace.Facebook.com) destiné à promouvoir la paix dans le monde. L’ambition semble démesurée : “Facebook est heureux de pouvoir aider au rapprochement entre les peuples grâce à sa technologie. C’est en aidant à communiquer et à échanger des idées que nous pourrons réduire les conflits à court et à long terme” Cette initiative repose sur un mouvement plus large à l’initiative de Stanford : Peace Dot. Le point saillant ici, c’est que Facebook tente, en se positionnant au dessus de la mêlée, de démontrer que son réseau permet de dépasser les traditionnels clivages qui opposent les nations traditionnelles, mais il le fait en usant des critères traditionnels objectifs de la Nation, en comptabilisant par exemple le nombre de liens d’amitié se créant dans le réseau entre historiques nations sœurs ennemies : Grecs et Turcs; Palestiniens et israéliens; albanais et serbes; etc..

L’objectif vraisemblable de ces deux initiatives est de franchir une étape décisive pour offrir un nouveau socle au lien social qui unit tous les membres du réseau: la mue d’une communauté partageant des intérêts communs à l’idée d’une nation partageant un devenir commun (le fameux “Vivre ensemble” de la définition subjective d’une nation)

L’exacerbation du sentiment d’appartenance à un réseau parait telle à certains, que des annonceurs y verraient même une opportunité de communication en jouant sur la fibre (osons) “réseaux-nationalistes” des membres. Par exemple dans cette vidéo promue par une marque, dont la description laisse songeur : “Facebook n’aime pas Twitter, qui lui ne supporte pas MySpace… Le conflit entre les plates-formes sociales n’est un secret pour personne et certaines marques l’ont bien compris… Pour la sortie de son dernier téléphone portable, le Samsung Corby S3650, la marque coréenne a recruté dans ses rangs des bloggeurs brésiliens prestigieux de 4 réseaux sociaux (Facebook, Orkut, Twitter et MySpace). Chaque représentant devait lever une mini armée pour affronter celle de son concurrent. Le but avoué était de bien entendu mettre en avant l’aisance du nouveau téléphone en matière de connectivité et de gestion des réseaux sociaux”

L’ère des réseaux-nations ou la future guerre des réseaux…?

Cliquer ici pour voir la vidéo.

» Article initialement publié sur Netpolitique

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